Mon ombre

William Blake



J'ai abandonné mon ombre.
Pour cela je l'ai parfois amenée à s'évaporer,
Vapeur délicieuse, dangereusement enivrante.
Hypnotisante compagne, je l'ai noyée dans les siens.
Je l'ai entouré de sa propre essence,
Jusqu'à la confondre avec un tout informe
Afin de m'en dégager de tout intérêt.
D'autres fois, je me suis mise sous le zenith
Sous la lumière, et la chaleur,
Faisant disparaître alors, mes passions, mes démons.
Peut on à vie rester là ?
Faire croire au monde que tout va ?
Je ne pouvais alors plus bouger,
Au risque de tout faire reculer.
C'est sous la lumière que ces choses
sont le plus invisible, insensible, imperceptible.

Mais voilà qu'elle reprend forme 
dès que mon âme entrouvre la porte
Et voilà qu'elle reprend place
dès que mon esprit cesse le combat.
Est-elle si dangereuse ?
Son goût amer éveille pourtant en moi une douceur sucrée,
Baisé divin de l'abstrait
Valse à trois temps dans mon coeur.
C'est alors que je retrouve cette place perdue, cette compagne incongrue.

Je suis complète, sensible, moi même émue de ces retrouvailles
mise dans une fragilité si rassurante.
Je ne suis plus seulement humaine
Mais un être sensible, contradictoirement émotive.
La méfiance reviendra
En désamour avec mon ombre
Que je regarde rarement en face
A qui je tourne souvent le dos.
Elle reprendra forme et force
Dès que j'ouvrirai la porte.

Comme d'autres avant moi, comme Blake avant moi, je ne lutterai pas.

Commentaires

Mokona a dit…
C'est sombre, mais pas agressif pour autant.
Exprimé d'une manière sereine mais pourtant teinté d'un goût amer.

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